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La Critique Fascine

4 octobre 2012

Aaltra - Benoît Delépine et Gustave Kervern - 2003

Aaltra

Un road-movie à l'humour noir en forme d'hommage à Aki Kaurismaki et à Libertad le béquillard.

Un cadre vivant à la ville rentre dans sa maison de campagne quand un appel de son patron l'oblige à revenir à Paris sous peine d'être licencié. Il ne pourra pas y arriver, la faute à un voisin jaloux le bloquant en tracteur. Les deux hommes en viennent aux mains, se battent et sont écrasé par la benne du tracteur. Ils se réveillent à l’hôpital, paralysés. Le coupable est désigné : Aaltra, le fabricant du tracteur. Ils partent donc en Finlande pour obtenir des indemnités.

Le film repose sur un mystère, une sorte de non-dit, d'entrée de jeu c'est le titre qu'on ne comprend pas. Le handicap est donc partout jusqu'à ce sombre titre. La scénario se décharge de toute scènes explicatives, souvent aussi lourdes qu'inutiles, pour aboutir à une fluidité poétique et captivante. Poétique ? Oui, il s'agit bien de poésie. Mais de la poésie quotidienne, de celle qui ressort de chaque jour de nos vies ennuyeuses et monotones.

De nombreux plans viennent soutenir cette "recherche artistique". Le plan de dos dans la chambre d’hôpital qu'on retrouvera, mais cette fois-ci dehors sur un énorme terrain de moto-cross, celui dans lequel Benoît et Gustave montent une côte surplombé d'éolienne, sorte de moulins à vent des temps modernes contre lesquelles les Don Quichotte nouveaux se battraient. Chaque plan, même les plans de coupe bien que peu nombreux, illustre un cri, empli d'espoir et de poésie, qui se résume en ce fait oublié que chaque instant relève du beau. Des plaisirs simples entourent cet œuvre, tout comme l'humour déclenché par un camion qui attend des handicapés pour partir au dernier moment.

La simplicité toujours dans les acteurs, tous choisis pour incarner leur propre rôle sans aucun dialogue préparé. En ressort une énergie naturel plus que convaincante et un humour pur, dans le sens premier du terme. Le son est naturel, chacune des prises de son s'effectue avec les micros, rien n'est enregistré ou mixé à l'avance. Le rythme lent du film permet de regarder, de regarder vraiment chaque scène, comme celle de la moissonneuse batteuse arrivant vers le tracteur de Gustave, scène d'un esthétisme rare au cinéma. Le noir magnifie cet esthétisme. Il permet l'intemporalité de l'époque. Ce film n'a pas d'époque, il a l'humanité comme sujet.

Au-delà, de cette poésie, hommage donc au cinéma de Kaurismaki, on découvre un fond. Un fond intéressant, profond, plus terre à terre. Un film anticinéma par essence, une équipe de 10 personnes s’embarquant dans l'été caniculaire de 2003 pour tourner dans l'Europe entière, sorte de studio géant à ciel ouvert, affranchie de tous les carcans et obligations qu'entraîne un tournage en studio. Une critique acerbe de la société marchande et un hommage à Libertad le béquillard, un anarchiste handicapé du XIXé siècle. De par leur voyage, les deux personnages reprennent possession de leurs vies et de leurs corps. Ils réapprennent le temps, à prendre leur temps, à se poser, à contempler, à ne rien faire. Et puis le sujet, tellement rare, il s'agit des gens, des vrais. Aaltra montre une réalité ignorée dans le cinéma. Ici, il s'agit d'un cinéma des laissés-pour-compte. Kervern et Delépine sont des Chabrol contemporains. Pas étonnant que ce dernier sera dans leur film suivant, Avida.

Cette épopée va les rapprocher. Cette amitié naissante se remarque en deux scènes. Lorsqu'ils pleurent dans leur chambre d’hôpital, ils sont seuls, chacun tournant le dos à l'autre, ils pleurent de leur côté. Lorsqu'ils rient après avoir volé la moto-cross, ils le font de face, ils rient ensemble. L'amitié n'apparaît que rarement mais elle est bien présente.

On enlève le côté gras de groland pour y sublimer son côté critique et poétique du réel, en résulte un film d'une grande beauté, une hymne à la vie, à la poésie, à la lenteur contemplative.

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26 septembre 2012

It's kind of a funny story - Ryan Fleck et Anna Boden - 2010

Funny_story

Un film qui redonne le goût de vivre, en forme de thérapie pour les coups de blues du quotidien.

Un adolescent perfectionniste tombe dans une sorte de "burnout", trop de stress, trop d'ambition et voilà le résultat : un appel à SOS suicide le conduisant en HP. Où il rencontrera une foule de gens charmants et reprendra le goût à la vie, la vraie.

Le casting est bien choisi. Keir Gilchrist déjà vu dans United States of Tara campe parfaitement cet ado en mal de vivre. Zach Galifianakis incarne le rôle paternel au sein de l'asile et apporte une touche de mélancolie très enrichissante (et pour le personnage principal et pour le spectateur), il sort des comédies américaines à l'humour plus que douteux (Oui, il paraît que Very Bad Trip serait drôle !) et trouve un film à sa hauteur pour donner une profondeur humaine à cette comédie (qui, elle, est drôle). Et puis Emma Roberts, ravissante en déprimée séduisante, bien que son rôle s'enferme un peu dans celui de "l'amoureuse".

Le décor participe à cet humour, un asile balayé de ces fous qui hurlent partout, des infirmiers violents timbrés de la camisole ou de la télé que les baveux fixent, on est loin, très loin des asiles de Vol au dessus d'un nid de coucou ou de L'Armée des douze singes. Ici, les patients sont des gens de tous les jours, des ados flippés par l'échec, des divorcés rongés par le doute ou des paranos dans un monde sécuritaire. Sans doute, pour nous rappeler que l'asile, c'est aussi un peu tous les jours. Une réflexion sur la folie et sa définition. Et évidemment une tentative de se libérer de tout ça, de ce décor. Les internés peuvent s'enfuir très facilement pour se balader dans tous l’hôpital et même aller sur le toit.

La bande-son, pour ainsi dire, est parfaite. Il n’y a rien à dire, elle accompagne à merveille chaque moment, comme si elle avait été écrite pour ce que l'on voit à l'écran. Les réalisateurs signent, après Half Nelson, un très bon film avec une mise en scène fluide et des dialogues efficaces.

La fin du film amène un vent de fraîcheur, une incitation à la vie, la vraie, rouler en vélo, dessiner, faire l'amour, s'amuser, les choses importantes, celles qui comptent vraiment dans la vie d'un être humain.

25 septembre 2012

Camille redouble - Noémie Lvovsky - 2012

Camille redouble


Une femme de 40 ans en plein divorce se retrouve, le soir du nouvel an, plongé dans son passé à ses 16 ans. Un remake non assumé de Peggy Sue s'est mariée.

Le film oscille entre humour et nostalgie. Une première demi-heure franchement drôle, où Camille profite pleinement de son retour à l'adolescence et où Noémie Lvovsky se fait littéralement plaisir. Puis une seconde partie où la nostalgie et la réalité reviennent au galop mais où le ton léger et agréable ne s'évapore pas pour autant.

Disons-le clairement, Noémie Lvovsky a autant de talent en tant qu'actrice que réalisatrice, c'est à dire beaucoup. Elle incarne parfaitement ce personnage qu'elle a choisi de jouer elle-même et donc avec son corps actuel. Ce choix en dit long sur la volonté décalée mais personnelle qu'elle mettait dans cet œuvre. Pleine de nostalgie donc presque de la mélancolie, de retrouver ses amis, ses profs, le goût de rouler en vélo (l'affiche est à ce titre fort justement inspirée), de manger la ratatouille de maman comme d'autre se rappelle des madeleines.

Malheureusement, la nostalgie reste ce qu'elle est, une illusion et le passé, aussi dur soit-il ne peut changer. Et la mère va à nouveau mourir. On le sait, et on se demande comment la réalisatrice va s'en sortir, passant de l'humour à cette scène qu'on redoute. Admirablement bien. Une scène d'une sobriété sans équivalent dont de nombreux cinéastes désireux de filmer la mort devrait s'inspirer. On enlève le pathos, le mélo gras qui tâche pour garder l'essentiel, le brut, ce qu'on ne pourra jamais changer.

Les acteurs continuent dans cette tranche de délire entre potes, Samir Guesmi, lui aussi en vieux-jeune, un Denis Podalydès convaincant en prof de chimie et surtout Mathieu Amalric méconnaissable en professeur barbu et aigri, sans oublier Anthony Sonigo dans une scène hilarante. Ce casting participe à l'ambiance fofolle de ce voyage dans le temps.

Le point noir du film demeure dans la pauvreté du message qui semble être : "dites aux gens que vous les aimez avant qu'il ne soit trop tard", sempiternel cliché, aussi entendu que discutable et qui laisse un goût amer, au vu du potentiel énorme de ce film et de sa réalisatrice.

En reste un film agréable à voir, amusant à bien des égards. Une comédie qui en dit long sur l'adolescence, la vraie (un petit clin d’œil à Gondry qui en apprendra un peu en regardant ce film). Et puis Noémie Lvovsky semble prendre du plaisir... et ça fait plaisir à voir.

 

24 septembre 2012

Jason Bourne - Tony Gilroy - 2012

Jason Bourne l'heritage

Qu'on se le dise, ce n'est pas le film de l'année. Cependant, l'opus parallèle de la trilogie Bourne (les "x dans la peau" en V.F) peut réconcilier bon nombre de spectateurs avec le film d'action.

Le scènario somme toute banal se résume facilement : un journaliste menace de dévoiler un programme secret de la C.I.A. Du coup les services secrets éliminent tout le monde, le journaliste, les scientifiques et les agents de ce programme. Mais (bah oui !), un agent et une scientifique leur échappent, la traque sera le film.

Passons vite sur les points négatifs pour nous attarder sur le côté plaisant du film. Comme dans tout film d'action hollywoodien, le problème se trouve dans le casting. Jeremy Renner tout en testostèrone n'apporte aucune profondeur et ce n'est pas ce qu'on lui demande. C'est un bonhomme, un vrai, il nage à poil dans l'eau glacée de l'Alaska, esquive d'un coup de rein des missiles et se bat à main nue contre un loup (oui, à main nue contre un loup !). L’interchangeabilité de tout ces acteurs (Renner peut être remplacé par Statham, Craig, LaBeouf voire même la dernière égérie du virilisme le nullissime Tom Hardy) renvoie à une inutilité de l'acteur qui met mal à l'aise. Edward Norton est juste mauvais et son personnage ne sert qu'à embrouiller une intrigue pas si simple à suivre.

Les points positifs, car il y en a et plus qu'il n'y paraît. Restons dans le casting pour saluer la performance de Rachel Weisz, toujours impécable. Le film lui doit beaucoup pour tenir le spectateur éveillé jusqu'à la dernière demi-heure. Et c'est tant mieux. Une demi-heure, d'action pure, brute mais réjouissante. La mise en scène se révèle assez fine et donne un peu de profondeur à cet opus, qui s'avère être meilleur que la trilogie, emmené par une musique de John Powell, proche de Hans Zimmer, qui avait déjà bien bossé sur les épisodes précédents.

Quant à l'action, la vraie, elle est orchestré de main de maître par Dan Bradley et ses cascades savoureuses. Elles se réapproprient l'urbanisme d'une manière impressionnante, drole et couillue (une moto qui slide sur les escaliers d'un centre ville, sans déconner ?). Car après tout, le film d'action réside en ce point même : réussir l'extraordinaire avec de l'ordinaire. Pari gagné.

Bon, ce n'est pas du grand cinéma, ni même un grand film d'action mais il permet un moment assez divertissant et c'est déjà pas si mal.

17 septembre 2012

Killer Joe - William Friedkin - 2012

killer Joe

Le cinéma durant la crise pue la morale et la bienséance. Clooney devient l'un des cinéastes les plus respectés et la violence et l'immoralité totale se retrouvent reléguées au second plan, dans le caniveau. C'était sans compter sur Friedkin.

Un jeune homme, Chris(Emile Hirsch), doit de l'argent à une sorte de mafia. Il a donc la merveilleuse idée de tuer sa mère pour toucher l'assurance-vie. Pour se faire, il va demander de l'aide à son père(Thomas Haden Church) et à sa belle-mère(Gina Gerson), vivant dans une caravane sur un terrain boueux que garde bruyamment un chien. Afin de s'acquitter de cette glorieuse tâche, il compte engager un tueur professionnel connu pour sa violence froide (et le monsieur tient promesse) qui désire un acompte : la sœur(Juno Temple) de Chris.

Le pitch nous renvoie aux plus belles heures du film noir mais aussi aux films de genre des dernières décennies. On pense autant à Hawks et Wilder qu'aux Coen et Tarantino. Ca sent le sang et l'acier, le violent et l'immoral, le mal et... le mal. Aux oubliettes les gentils, le bon, le héros, ici il n'y a que salauds, fêlés et psychopathes. Friedkin délivre le spectateur de l'empathie, personne ne trouve grâce à ses yeux et on n'a envie d'en voir aucun de sauvé.

Ce que l'on a devant nous révèle aussi une terrible absurdité. Le comportement de Chris est stupide, il doit 6 000$ à un parrain et va dépenser 25 000 $ pour empocher les 50 000 $ de l'assurance-vie de sa mère. Tout le reste du film se retrouvera dans ce grotesque, la farce humaine(n'oublions pas qu'il s'agit au départ d'une pièce de théâtre) est en route, jusqu'à cette scène de fin jubilatoire, où la cocotte-minute que fait bouillir Friedkin va se mettre à exploser dans un tonnerre de violence et de non-sens.

La direction d'acteur illumine cette noirceur, oscillant toujours entre aberration et gravité, les acteurs donnent sens à cette constante ambiguïté. Mention spéciale à Matthew McConaughey qui incarne un personnage sadique, froid, glacial mais terribement drôle et ironique, une véritable performance dans le jeu d'acteur. McConaughey vient probablement de gagner un aller-simple vers la cour des grands.

Friedkin n'appartient peut-être pas à la trempe des génies, possible même qu'il ne signe pas son meilleur film toutefois il est indéniable que seul lui pouvait se permettre de montrer une telle violence savamment orchestrée, sans pour autant provoquer d'indigestion. Grâce à une mise en scène électrique qui  accumule les tensions jusqu'à nous les faire péter en pleine face. Il est le seul à pouvoir s'affranchir ainsi de la morale occidentale et de l'éclabousser de ses propos subversifs sanguins tout en restant clairvoyant sur ce qui l'entoure.

De la violence donc mais aussi de l'humour, du noir, de l'absurde, de l'ironique. De véritables scènes comiques, comme cette jouissive parodie de procès pour savoir à qui appartient le pénis qui apparaît en photo dans la bouche de la belle-mère et McConaughey en avocat-enquêteur de demander le plus solennellement du monde : "So, whose dick is that ?". On rigole, et beaucoup. Devant ce spectacle grotesque et sadique, la réaction qu'incite donc Friedkin est le rire. Mais un rire sarcastique emprunt de scepticisme et de désespoir. Si dans L'Exorciste, le bien se battait, si dans French Connection les mafieux conservaient une certaine... élégance, ici il n'y a que du noir et rien à sauver de l'espèce humaine. Friedkin nous délivre ce message sans attente de lendemains qui chantent et franchement, qui peut lui donner réellement tort ?

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16 septembre 2012

The We and the I - Michel Gondry - 2012

The We and the I

Michel Gondry tente une nouvelle expérience : un huis-clos dans un bus avec des adolescents. Malheureusement, il n'innove pas et tout est du déjà-vu.

Le film suit le trajet d'un bus plein d'adolescents sortant de leur dernier jour de cours, le chahut, les taquineries, voire même la violence laissent peu à peu place, au fur et à mesure que le bus se vide, à des échanges plus personnels.

Cependant, le film n'apporte rien de nouveau, des adolescents caricaturaux, violents et imbéciles. La première partie assourdit, le bazar de ces ados est insupportable et inintéressant. Il en reste une vision très détestable de la jeunesse. Des gamins abrutis par les nouvelles technologies, véritables bourreaux en société se retrouvent être des handicapés sociaux en face à face. Certes, un stéréotype peut s'approcher de ce que nous décrit Gondry mais ne serait-il pas plus utile et épanouissant de s'en affranchir ? La jeunesse ne ressemble en rien, et heureusement, à ce que Gondry décrit. Il n'y a aucune vraisemblance. Juste des clichés maintes fois vus au cinéma (et surtout dans les séries familiales M6, souvent aussi afro-américaines !).

Les dialogues sont d'un ennui impressionnant et il est possible de quitter la salle juste à cause de leur stupidité. Lors de la première partie, il n'est question que de vannes ou de choisir qui viendra à la soirée, de fait en analyser les conversations serait que pure perte de temps. Passons de suite à la dernière partie que Gondry veut profonde. Ils sont tout autant risibles et ennuyeux, l'un va expliquer que son père est mort, alors il deviens sympathique, cela ne suffit pas à en faire un personnage. Tout le monde a perdu quelqu'un dans sa famille, malheureusement on en devient pas tous meilleur, loin de là. Michael, personnage principal, cherche à tout prix à ne pas s'ennuyer une fois ses amis partis et va raconter débilités sur inepties. Teresa sera la victime dont le spectateur se doit d'être proche, mais l'empathie ne peut se faire tant il est impossible de croire à ce qu'elle nous raconte.

Le scénario sonne creux, surtout la fin aberrante. Un jeune homme, dont on a vu de manière oppressante une vidéo meurt poignardé. Du mélo-drame à l'eau de rose qui vient enfoncer un film déjà très mauvais. On a l'impression de voir une adolescente nous expliquant qu'à l'école elle souffre car les grands sont méchants avec elle, que la vie ça fait peur et que c'est trop dur d'être jeune.

Quant au cinéma à proprement parlé que l'on a sous les yeux, c'est faible, très faible. Il ne suffit pas de mettre de la musique nostalgique sur un coucher de soleil d'une rue déserte de New-York pour créer une ambiance. Il n'y a que brouhaha et bonnes idées gâchées. Les bricolages amateurs qu'aurait pu aimer le spectateur dans un autre Gondry ne sont que pur gadget. La mise en scène est prévisible et la métaphore du bus conduisant ces jeunes vers un avenir incertain manque de pertinence.

Gondry campe une position purement hautaine avec des effets qui ne sont que fanfaronnades. Hormis Soyez sympa, rembobinez, sa filmographie est pleine de films ratés basés pourtant sur des scénarios et une conception qui pouvaient intéresser un grand nombre de cinéphiles. A croire que le problème n'e réside pas dans le film mais dans le réalisateur...

14 septembre 2012

Insidious - James Wan - 2010

Insidious

La souvent pertinente Wild Bunch distribue, la talentueuse Rose Byrne interprète et le Festival de Catalogne présente, autant d'ingrédients qui nous promettait une bonne séance frisson. C'est raté et pas qu'un peu. La seule chose que le film réussit réside justement dans ce ratage, un échec parfait. Et en y regardant de plus près, le réalisateur des Saw dirige, le scénariste des mêmes saletés écrit, le producteur de Paranormal Activity paye et surtout un avertissement devait nous faire comprendre ce qu'on aurait sous les yeux : "par les créateurs de Saw et Paranormal Activity".

Un couple achète une nouvelle maison. Leur enfant tombe dans le coma et des apparitions se montrent à la mère. Ils retournent dans leur ancienne maison mais les phénomènes empirent. Finalement, leur fils est un voyageur astral et il s'est égaré dans le Lointain (sorte d'Enfer). Par chance, son père aussi est un voyageur astral qui s'ignore et va le rechercher sain et sauf à moins que...

Voilà en quoi consiste ce scénario mille et une fois déjà entendu, jamais convaincant il ne l'est toujours pas la mille et deuxième fois. Au-delà de cette absence d'imagination, on découvre de véritables bêtises. Le médium appelé par la famille chasse les fantômes en masque à gaz dans une scène flash à fortement déconseiller aux épileptiques. Les deux Ghostbusters de ce médium sont des caricatures ratées de Frost et Pegg. Le Lointain se trouve être un château, avec des bougies, une lumière rouge et des chaînes partout, cet endroit terrifiant est donc.. un donjon S.M ! Dans lequel vit un monstre, peut-être le diable, tout droit sorti du clip de La Salsa du Démon. Les scénaristes n'ont bien sûr pas oublier de mettre une vieille dame en voile noir qui (attention spoilers) s'avère à la toute fin avoir pris possession de l'âme du père.

Les effets pour susciter la peur sont plus qu'usés (caméra à droite, à gauche, devant, et pam le monstre est à gauche, musique tendue, derrière la porte... une souris on se détend et bouh c'est là que le monstre arrive !) ils sont carrément rouillés. On connaît le film avant de l'avoir vu, la musique, le scénario, les plans(notons des références amusantes à Kubrick), les jeux d'acteurs et le final, tout est prévisible. Sauf, il faut le reconnaître, le grotesque qui tourne autour du médium et du voyage astral. Le genre Horreur se porte mal, tout le monde le sait, ce n'est pas une raison pour remuer le couteau.. Quoique pour le réalisateur de l'indigent Saw, ça semble finalement cohérent.

Le récent regain de passion envers la série B et le film de genre que Tarantino et Rodriguez ont lancé est coupable. N’importe quel réalisateur en mal d'imagination se jette dans la brèche ouverte, pour le meilleur, parfois, et pour le pire, surtout. On rigole, et franchement, devant le ridicule de certaines scènes. On sourit devant la ravissante Rose Byrne en larmes. On s'amuse à retrouver de multiples références, le seul intérêt du film. Et finalement on s'interroge sur le talent présumé de James Wan qui ressemble de plus en plus à une imposture.

12 septembre 2012

Raising Hope - Greg Garcia - 2010-en cours

Raising Hope

Vous aimez My name is Earl ? Vous adorerez Raising Hope ! Le créateur est le même, Greg Garcia. Le pitch intrigue : Jimmy, un jeune homme immature de 23 ans, passe la nuit avec une fille qui s'avérera être une tueuse en série, elle sera arrêtée et condamnée à mort. La malchance choisissant généralement les personnages de Garcia, Jimmy va apprendre qu'elle était enceinte. Il va donc devoir élever sa fille seule, enfin plus exactement avec sa famille.

Ainsi, ça ressemble à Earl, un cas soc. trouve un but à sa vie. On reconnaît aussi un peu de Malcolm, la famille cinglée de l'Amérique pauvre, la vraie, la crasseuse. D'ailleurs la grand-mère(enfin arrière grand-mère dans Raising Hope) est la même, Cloris Leaman (Maw-Maw) jouait déjà Ida dans Malcolm. Cependant, dès les premières images on se rend compte du talent de Garcia et de la force de ses acteurs pour innover et impressionner. Dans les séries sur les familles, le casting du père et de la mère est fondamental. Martha Plimpton, véritable coup de coeur, brille en mère ultra protectrice, sensible et hilarante mais finalement tellement réelle. Quant à Dilahunt, il ne parvient pas à occulter l'inoubliable Bryan Cranston néanmoins il incarne à merveille un père beauf, prolo, amoureux, lui aussi dingue et, avouons-le, très réaliste.

De l'humour à l'état brut et dans tous ses états. Il n'y a pas qu'un humour, mais plusieurs. L'humour-personnage, grâce notamment à Maw-Maw, vieille cinglée qui enchaîne conneries sur gaffes mais qui retrouve par moment sa lucidité et devient le personnage le plus intelligent de la série. Aussi avec tous les personnages secondaires décalés, dont la plupart des acteurs vient de Earl et/ou Malcolm. L'humour de situation, et forcément avec un homme de 25 ans à la fin de la saison 2(ce n'est plus du tout un adolescent) qui vit chez ses parents pour élever sa fille qu'il a eu avec une condamnée-exécutée à mort et qui bosse dans un supermarché d'une petite ville du fin fond des États-Unis, les situations comiques ne manquent pas. Et puis l'humour-délire, c'est bête, trash mais irrésistible.

A côté de ça, du plus profond. Ce qui frappe particulièrement, c'est à l'image de Earl, cette préoccupation constante d'être meilleur, de s'élever. Être bon humainement parlant, malgré la malchance et la pauvreté. Pas la morale chrétienne américaine de Disney ou autres cochonneries sur la réussite financière. Mais celle des prolos, où finalement la solidarité et l'amour des siens priment sur la volonté de s'enrichir. Être meilleur importe plus aux personnages de Garcia que trouver l'amour ou se faire de l'argent. Quand Jimmy veut séduire Sabrina, il le fait avec et grâce à son clan. Au-delà de la famille traditionnelle, cette idée de clan ressort dans la solidarité, le clan implique la communauté, le groupe social...

Bref, c'est à découvrir, au même titre que Earl. Car en allant chercher dans la vie des gens, les vrais, bah inévitablement ça ressemble aussi un peu à la nôtre...

11 septembre 2012

Nosferatu Fantôme de la Nuit - Werner Herzog - 1979

Nosferatu-Herzog

Il s'agit d'un remake de Nosferatu le vampire de Murnau. Le film s'ouvre avec des momies mexicaines. Le mystère commence et ne va que s'épaissir durant le film, si Murnau nous a effrayé, Herzog surprend et inquiète, il réalise un film de vampire alors même que le spectateur ne verra qu'une seule goutte de sang, paradoxalement celui de Nosferatu. La bande-son mystérieuse, si ce n'est mystique, composée par Popol Vuh plonge le spectateur dans un brouillard sans fin.

Kinski campe un Nosferatu tragique, solitaire et qui en souffre. Herzog en fait un remake plein de tristesse. Il n'est pas le vampire terrorisant, ni séduisant que le cinéma montrera x fois. Il est torturé et en mal d'amour.

Nosferatu est un personnage, il n'est pas mort avec la fin du film de Murnau, Herzog le ressucite par l'intermédiaire de Lucy qui rêve de lui et de ce fait le ramène à nous. Schreck et Kinski l’interprète identiquement, les même geste ce même visage inoubliable et cette même emprise sur tout ce qui l’entoure.

Adjani spectre blanchâtre qui erre parmi les vivants, c'est la raison pour laquelle Nosferatu se reconnaîtra en elle et la choisira. Elle n'est pas, contrairement à ce que souvent on entend, belle. Elle est même l'inverse, blanche, froide presque déjà morte, à l'image de Nosferatu. Pour lui, l'embrasser fut mourir.

Le film franchit aussi les limites du réel, logique quand on parle de vampire. Ce qui l'est moins, c'est parcourir les Carpates jusqu'à Wismar en bateau. Le rêve hante le film et les festivités pré-apocalyptique accentuent le doute sur ce que l'on voit.

Herzog fait bien plus qu'un énième remake, il ressuscite l'un des personnages les plus effrayants du cinéma, pour en compléter la psychologie. Non seulement il rend un vibrant hommage à l'originale mais il va jusqu'à enrichir cette histoire. Il nous offre une œuvre à l'esthétisme exceptionnelle, rarement film ne s'est autant regardé tel un tableau. A voir, à revoir et à déguster.

 

10 septembre 2012

R.I.F Recherche dans l'Interêt des Familles - Franck Mancuso - 2010

R

Le film commence nerveusement. Une intervention tendue d'un policier surexcité incarné par Yvan Attal. Puis un départ en vacances sur une route perdue, une panne, un conducteur de pick-up inquiétant copie conforme du redneck(joué par le toujours inquiétant Carlo Brandt) et une station-service aux allures de motel dans une Lozère aux accents d'Oklahoma. Du canada-dry de thriller américain. Une éniéme tentative d'un ex-flic dans le polar qui tente d'imiter le lourd Marchal ? Pas si sûr.

Car bien que ça résonne comme une envie de plaire et de ressembler à ce qui marche, la présentation est terriblement efficace et on est dedans très rapidement. Les constants mouvements de caméras sont là pour nous tenir en haleine jusqu'à cette apogée de la nervosité avec le visionnage des caméras de surveillance. Le hic, car oui ce n'est pas parfait, loin s'en faut, réside justement dans cette ambiance. Mancuso installe un "truc" malheureusement il ne démarre pas même il s'épuise et s'y enferme. Au bout d'une demi-heure, le film aurait besoin d'un second souffle qu'il ne trouve jamais. Mancuso, à mi-film, nous montre une tendresse qu'on ne soupconnait pas (mais aussi dont on se fichait), le fils qui embrasse son père puis qui caresse un chat alors que les deux gendarmes plaisantent entre eux. La tension est tombée, elle ne se relèvera plus.

Les deux gros points noirs de ce film résident dans les dialogues lassants, pas assez réalistes mais surtout dans la musique signée Louis Bertignac qui est une véritable torture et qui ne colle en rien à l'ambiance qu'on a aimé au début. Le scénario, notamment sur sa fin, méritait semble-t-il quelques retouches mais reste rondement mené par une mise en scène qui malgré tout reste globalement un bon liant . Points positifs, et il y en a, les jeux d'acteurs. Et surtout Pascal Elbé campant un gendarme de campagne plus habitué aux excès de vitesse qu'à leur homologue de la violence qui livre là sans l'ombre d'un doute l'une de ses performances les plus abouties mais aussi Attal impécable dans le rôle du traqueur traqué, haut en adrénaline et en noirceur. La photo y est pour quelque chose, elle ne souffre d'aucun reproche et appuit avec force chaque plan de son opacité grisâtre. Et puis reste le réalisateur, qui après une véritable daube sans nom nous présente une oeuvre non pas complète mais qui promet peut-être quelques bons moments en sa compagnie pour les prochains projets.

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